Les stylistes de mode salariés peuvent être titulaires du droit d’auteur sur leurs créations

Un récent arrêt de la Cour de Paris devrait retenir l’attention des stylistes de mode salariés ainsi que de leurs employeurs.

Dans cette affaire, un styliste avait été embauché comme styliste accessoires en 2013 par une entreprise française de prêt-à-porter et d’accessoires féminins. Il avait, selon lui, créé en septembre 2014 « une paire de basket vintage », dessinée pour évoquer les années 80, mais avait réinterprété le modèle « en [le] déstructurant totalement pour parvenir à une forme innovante et originale. » Le modèle, appelé Slash et qui connut un grand succès, apparut pour la première fois dans la collection Printemps/Été 2015 de la société.  

Le styliste prétendait être l’auteur de ce modèle, ainsi que de son sac d’emballage et de sa semelle d’inspiration léopard. Il assigna la société en contrefaçon de droit d’auteur et de dessins et modèles, prétendant en outre que les dessins et modèles français de ces trois articles, déposés auprès de l’INPI, devaient lui être transférés. Il fut débouté de ses demandes en juin 2019 par le Tribunal de grande instance de Paris et interjeta appel. La Cour d’appel de Paris confirma l’arrêt du TGI de Paris le 5 mars 2021.

Selon la société intimée, la basket Slash avait été créée par la directrice du style, qui, selon les termes de son contrat, avait la charge de diriger l’équipe des stylistes, y compris l’appelant, dont le propre contrat spécifiait qu’il était « rattaché à la directrice du style ».

La Cour d’appel de Paris rappela tout d’abord qu’une œuvre est protégée par le droit d’auteur, sans qu’aucune formalité n’ait à être accomplie, pour peu qu’elle soit originale. L’auteur doit néanmoins rapporter « la preuve d’une création déterminée à une date certaine et (…) caractériser l’originalité de cette création ».

En l’espèce, la Cour nota qu’il n’était pas possible d’attribuer la paternité des semelles léopard au styliste, car les dessins qu’il avait produits n’étaient ni signés, ni datés. Cet arrêt nous informe que les professionnels de la mode soucieux de pouvoir prouver la paternité de leurs créations doivent avoir à cœur de dater et signer leurs dessins et croquis.

L’auteur doit également pouvoir prouver qu’il a créé l’œuvre. Dans cette affaire, la directrice du style avait témoigné qu’elle avait discuté de la basket Slash avec le styliste, tout d’abord pour échanger leurs idées sur les matières et les formes, puis, lors d’un second entretien, afin qu’elle valide le croquis du styliste. La société avait en outre produit un courriel envoyé par le styliste demandant à la directrice du style d’approuver le modèle de la boîte à chaussure, où il référait en outre à l’équipe de style qui avait « souhaité revoir la couleur des lacets etc… »

La Cour d’appel avait conclu que « l’autonomie créatrice [du styliste] [était] restreinte, puisqu’il devait obtenir l’approbation de la directrice du style et de l’équipe de style et « travaillait en collaboration avec l’équipe de style de la société et sous la subordination de sa directrice de style ». Le styliste « n’établit pas la titularité des droits d’auteur sur la basket Slash, la boîte/sac d’emballage, et la semelle léopard créées pour la collection (…) de printemps-été 2015. »

Bien que l’arrêt n’ait pas donné raison au styliste, il est tout de même intéressant à connaître pour les créateurs de mode salariés. En effet, la Cour d’appel précisa que :

« (…) l’existence d’un contrat de travail n’est pas exclusive de la protection par le droit d’auteur et le salarié est investi des droits de propriété incorporelle institués au bénéfice de l’auteur pour peu qu’il ait fait œuvre de création en conservant sa liberté et sans que les choix esthétiques opérés ne lui aient été imposés par l’employeur ».

Ainsi, un styliste salarié peut-être titulaire du droit d’auteur sur les modèles créés, si tant est qu’il a conservé sa liberté et que l’employeur ne lui a pas imposé « les choix esthétiques opérés ». Les stylistes bénéficieront sans doute de tenir un journal personnel de création et de noter les étapes qui ont abouti à la création d’un modèle, un procédé utile aux entreprises employant des stylistes salariés afin de pouvoir prouver avoir imposé leurs choix esthétiques à leurs employés.

Cour d’appel de Paris, pôle 5, 2e ch., 5 mars 2021, 19/17254 (D20210011), Michaël A c. C. des c. SAS, confirmant le jugement du 28 juin 2019 du Tribunal de grande instance de Paris, 3ème chambre, 3ème  section , RG n° 17/12374

La publicité en faveur des énergies fossiles pourrait prochainement être interdite par la loi

Le Gouvernement a engagé la procédure accélérée le 10 février 2021 sur le projet de loi nº 3875 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets.

Le Chapitre II du projet de loi propose de réguler les publicités « sur les produits et services ayant un impact sur le climat excessif ». Il pourrait être ajouté un article 581‑25‑1 au Code de l’environnement interdisant la publicité en faveur des énergies fossiles, à compter d’un an suivant l’entrée en vigueur de la future loi. Un décret en Conseil d’État devrait préciser la liste des énergies fossiles concernées ainsi que les modalités qui s’appliqueront aux énergies renouvelables incorporées aux énergies fossiles.

Ce décret en Conseil d’État devra néanmoins tenir compte « des exigences d’un bon accès du public, en particulier les personnes ayant un revenu modeste, à l’information relative au prix des énergies concernées, ainsi que des obligation légales ou règlementaires qui s’imposent aux fournisseurs et distributeurs de ces énergies. » Le gouvernement semble se souvenir que le mouvement des « Gilets Jaunes » avait en partie été inspiré par la hausse du prix du carburant.

Le non-respect de ces nouvelles dispositions pourrait être puni d’une amende de 30 000 euros pour une personne physique et de 75 000 euros pour une personne morale. Ces amendes pourraient être portées au double en cas de récidive.

L’article 14 de la loi n° 86‑1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication serait ainsi complété :

« Le Conseil supérieur de l’audiovisuel promeut en outre, en matière environnementale, des codes de bonne conduite ayant notamment pour objet de réduire de manière significative les communications commerciales audiovisuelles relatives à des biens et services ayant un impact négatif sur l’environnement, en particulier au regard de leur empreinte carbone, des émissions de gaz à effet de serre qu’ils génèrent et de leur participation à la déforestation. Ces codes visent également à prévenir des communications commerciales audiovisuelles présentant favorablement l’impact environnemental de ces biens ou services. »

Le Conseil supérieur de l’audiovisuel serait ainsi en charge de produire des codes de bonne conduite, une « soft law » permettant aux annonceurs de mettre en place des bonnes pratiques.

Le Conseil d’État a publié son avis sur le projet de loi le 4 février dernier. Il note que, selon une jurisprudence constante de la Cour de cassation, la publicité désigne « tout moyen d’information destiné à  permettre  au  client  potentiel  de  se  faire  une  opinion  sur  les  caractéristiques  des  biens  ou services qui lui sont proposés » et qu’ « [à] ce  titre,  toute  restriction  qui  est  apportée  à  la  publicité  est  susceptible  de  porter atteinte à la liberté d’entreprendre, au droit de propriété ainsi qu’à la liberté d’expression et de constituer une entrave à la libre circulation des marchandises ou à la libre prestation de services. »

Le Conseil d’État souligne que des restrictions peuvent néanmoins être apportées à la publicité par le droit, citant, en particulier, la décision n° 90-283 DC du 8 janvier 1991 du Conseil constitutionnel sur la loi relative à la lutte contre le tabagisme et l’alcoolisme et la décision n° 2015-727 DC du 21 janvier 2016 sur la loi de modernisation de notre système de santé. En outre, le Conseil constitutionnel a, dans sa décision n° 2019-823 QPC du 31 janvier 2020, Union des industries de la protection des plantes, fait de la protection de l’environnement, patrimoine commun des êtres humains, un objectif de valeur constitutionnelle. À ce titre, un autre principe de valeur constitutionnelle, la liberté d’entreprendre découlant de l’article 4 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, peut être limitée.

Le Conseil d’État note, en outre, que « la France est tenue par des engagements précis en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre, pris notamment dans le cadre de l’accord de Paris, adopté le 12 décembre 2015, et déclinés en objectifs chiffrés contraignants édictés au niveau de l’Union européenne ». Il en déduit que le nécessaire respect de ces engagements peut justifier des mesures « tendant à restreindre ou à interdire la publicité pour des biens ou des produits fortement consommateurs d’énergies fossiles, voire pour la consommation de telles énergies ».

Le Conseil d’État regrette, cependant, que le projet de loi énonce un principe général d’interdiction de « la publicité  en  faveur  des  énergies  fossiles », mais confie au pouvoir règlementaire le soin d’en définir son champ d’application, sans préciser « le  périmètre  ou  les  effets  attendus  des  mesures » , alors que l’étude d’impact indique simplement seront visés « l’essence, le gaz, les stations-services, les produits pétroliers, etc ». Le Conseil d’État n’a ainsi pu disposer d’éléments lui permettant de préciser le champ de l’interdiction envisagée par le projet de loi.

Le Conseil d’État souligne que le projet de loi utilise une « expression très générale » qui « ne permet pas de savoir si l’interdiction vise uniquement des publicités directes pour une source d’énergie, n’incluant pas de référence à un produit utilisant l’énergie, ou si elle concerne aussi des publicités se référant à la fois à une énergie et à un produit consommateur d’énergie ».  Il estime que si la loi pourrait être entachée d’incompétence négative si elle ne désigne pas quels sont les modes de publicité et les biens et énergies visés par une mesure d’interdiction. En outre, la loi prévoit des sanctions pénales, et son manque de précision pourrait porter attente au principe de légalité des délits et des peines.

C’est pourquoi le Conseil d’Etat ne peut retenir ces dispositions. Les prochains débats à l’Assemblée Nationale seront l’occasion de voir de quelle manière les députés entendent modifier le projet de loi en tenant compte de l’avis du Conseil d’Etat.

 

Le Conseil d’État rappelle que les opinions qui choquent sont protégées par la liberté d’expression

Le 2 février 2017, au cours de sa chronique sur RTL Matin, On n’est pas forcément d’accord, Éric Zemmour avait tenu des propos qui avaient attiré l’attention du Conseil Supérieur de l’Audiovisuel (CSA).

L’animateur avait salué la nomination par Donald Trump de Neil Gorsuch à la Cour Suprême des États-Unis et avait argumenté que le nouveau juge allait mettre fin à la pratique de la Cour suprême de « tordre le texte de la Constitution américaine pour lui faire dire ce qu’elle ne disait pas ». Zemmour reprochait à la Cour suprême d’avoir « imposé leur idéologie progressiste au peuple américain (…),  ce putsch judiciaire (…) qui s’appelle non-discrimination ».

L’animateur avait continué en reprochant à la Cour européenne des droits de l’homme, au Conseil constitutionnel et au Conseil d’État d’avoir « fait exactement la même chose que la Cour suprême. Le même putsch judiciaire, le même fétichisme de la non-discrimination, la même déclaration des droits de l’homme tordue dans tous les sens».

RTL est une radio privée et doit par conséquent passer une convention avec le CSA, au nom de l’État, en vertu de l’article 28 de la loi du 30 septembre 1986.

L’article 42 de la loi du 30 septembre 1986 donne en outre au CSA le pouvoir de mettre en demeure « les éditeurs et distributeurs de services de communication audiovisuelle de respecter les obligations qui leur sont imposées par les textes législatifs et réglementaires et par les principes définis aux articles 1er et 3-1 ».

L’assemblée plénière du CSA avait rendu une décision le 14 juin 2017, qui avait mis en demeure RTL radio de respecter les stipulations de la convention passée avec le CSA.

Le CSA, selon les termes de son communiqué, considéra

« que la gravité et le caractère provocateur des propos tenus par le chroniqueur, qui constituent un éloge de la discrimination et la critique de toutes les institutions judiciaires qui contribuent à lutter contre celles-ci, alors que ces propos n’ont fait l’objet d’aucune contradiction ni mise en perspective à l’antenne, constituaient un manquement caractérisé aux stipulations de la convention de RTL. Celles-ci précisent en effet que l’éditeur doit en effet veiller à promouvoir les valeurs d’intégration et de solidarité qui sont celles de la République et contribuer aux actions en faveur de la cohésion sociale et à la lutte contre les discriminations. »

RTL demanda au Conseil d’État d’annuler la décision pour excès de pouvoir, et, par une décision du 15 octobre 2018, le Conseil d’État annula la décision du CSA.

Le Conseil d’État cita tout d’abord l’article 1er de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, selon lequel :

« La communication au public par voie électronique est libre. L’exercice de cette liberté ne peut être limité que dans la mesure requise, d’une part, par le respect de la dignité de la personne humaine, de la liberté et de la propriété d’autrui, du caractère pluraliste de l’expression des courants de pensée et d’opinion et, d’autre part, par la protection de l’enfance et de l’adolescence, par la sauvegarde de l’ordre public, par les besoins de la défense nationale, par les exigences de service public, par les contraintes techniques inhérentes aux moyens de communication, ainsi que par la nécessité, pour les services audiovisuels, de développer la production audiovisuelle ».

Le CSA avait considéré que la radio s’était bien engagée par la convention conclue le 2 octobre 2012 entre CLT-UFA, la société éditrice de RTL, et le CSA, de « veiller à promouvoir les valeurs d’intégration et de solidarité qui sont celles de la République (…) [et à contribuer] aux actions en faveur de la cohésion sociale et à la lutte contre les discriminations ».

Mais, pour le Conseil d’État, si le principe d’égalité devant la loi interdit bien les discriminations, et si la radio s’était bien engagée par convention à promouvoir ces valeurs républicaines et à contribuer à la lutte contre la discrimination, il n’en demeure pas moins que ces obligations doivent « se combiner avec le principe de la liberté de communication des pensées et des opinons » qui est consacré et protégé par la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, à valeur constitutionnelle, et qui est rappelé par l’article 1er de la loi du 30 septembre 1986.

Le Conseil d’État rappela enfin que Zemmour s’était exprimé durant une émission de trois minutes, qui invite des chroniqueurs aux opinions diverses et  dont le titre même « On n’est pas forcément d’accord », « invite les auditeurs à ne la recevoir qu’en tenant compte de son caractère polémique ».

Cette décision du Conseil d’État n’est pas surprenante puisque la liberté d’expression doit, selon les termes de la Cour européenne des droits de l’homme, protéger les informations et les opinions « qui heurtent, choquent ou inquiètent l’État ou une fraction quelconque de la population » (CEDH, Handyside c. Royaume-Uni, 7 décembre 1976).

Does a French copyright smell anything?

The FIAC, the international fair of contemporary art, took place in october in Paris. Its visitors were able to visit a glass cube, the OSNI, placed on top of the Pavilion of the Palais de Tokyo. OSNI stands for Objet Sentant Non Identifié, ‘Unidentified Scented Object’ and was created by Mathilde Laurent, a perfumer for Cartier, along with Munich climate engineers Transsolar.

Visitors entering the cube were able to go up a staircase through a cloud of the Cartier L’Envol (The Flight) perfume. The cloud is clearly seen to viewers outside OSNI. The fact that the perfume can be seen is as important as it can be smelled.

This installation led French magazine Télérama to ask the question: can perfume be a work of art? Modernist called it “[a] true olfactory and immersive artistic work that presents a completely new way of using smell as a medium of creation.

Wallpaper quotes Mathilde Laurent as saying “I’m not an artist…but…I feel that to create a piece like this is our duty as a house because it’s important that we sustain olfactory art like all others.”

Could OSNI be a work of art? Is there such thing as olfactory art?

Perfume is not protected by French copyright.

Even though article L.112-1 of the Intellectual Property Code clearly provides that its provisions “ protect the rights of authors on all works of the mind, regardless of genre, form of expression, merit or destination,” perfumes are not protected by French copyright, the droit d’auteur. The Cour de Cassation, France’s highest civil court, ruled in 2008 that “the fragrance of a perfume, which proceeds from the simple implementation of a know-how, does not constitute the creation of a form of expression that can benefit from the protection of copyright”. Therefore, L’Envol is not protected by copyright.

However, OSNI is way more than a perfume. It is an art installation, with which visitors are interacting.

Does France protect performance art?

OSNI’s visitors were able to go up and down the staircase inside the cube, and were seen from outside. Were they part of the performance? Were their reactions to the scented air part of the performance?

France recognizes that an artistic performance may be protected, not by copyright law, however, but by the right in one’s image. Reproductions of an artistic performance, such as photographs taken of it, are, however, protected by the droit d’auteur. In that case the performance artist and the photographer are co-authors, Paris Court of Appeals, 4th Chamber B, December 3, 2004.

Is the perfume an element of the protected work, the cube?

If perfume can not be protected as a scent, could it be protected as a work of art? The perfume is clearly seen here, and can be smelled only if one is inside OSNI. Viewers from outside cannot smell it, but they can see the way the cloud of perfume moves inside the cube.

The cube can be considered a sculpture, and, as such, protected by the droit d’auteur. The scent is part of it and thus protected as an element of the sculpture, but still does not gain individual protection. However, one could imagine that if Cartier were to sell OSNI to an art collector, who would then replace the scent with the one of his favorite aftershave, this would be copyright and droit moral infringement, and would conjure the issue of whether perfume is protected by the droit d’auteur out of the (crystal) bottle.

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La rémunération d’un gérant d’une société à responsabilité limitée est due tant qu’aucune décision la révoquant n’est intervenue.

Un associé et co-gérant d’une  société d’exercice libéral à responsabilité limitée (Selarl) de médecins avait cédé ses parts en septembre 2006 à la Selarl et cessé son activité médicale dans cette Selarl. Notons qu’une Selarl est une Sarl (société à responsabilité limitée). L’ancien associé assigna la Selarl en paiement des indemnités de gérance perçues par ses coassociés en janvier et février 2006, soit 8.000 euros chacun. La Selarl fut condamnée par le tribunal de grande instance de Brest à payer 12.000 euros à l’ancien associé, qui fut néanmoins débouté de sa demande de prise en charge des cotisations sociales pour la même période.

Il interjeta appel devant la Cour d’appel de Rennes, qui débouta l’ancien associé de sa demande en paiement de la somme de 12.000 € pour ses indemnités de cogérant de janvier et février 2006 et de sa demande de prise en charge des indemnités de sécurité sociale pour la même période.

L’ancien associé se pourvu en cassation.

Demande en paiement des indemnités de cogérant

Pour déclarer sa demande irrecevable, la Selarl avait opposé à son ancien associé un protocole d’accord valant transaction rédigé par acte sous seing privé en date du 24 juillet 2006, mais la Cour d’appel le déclara irrecevable parce que l’ancien associé ne l’avait pas signé. En revanche, il avait bien cédé à la Selarl, par acte sous seing privé en date du 14 septembre 2006, ses parts sociales pour 62.652,00 euros, somme qui lui avait été payé comptant.

Cour d’appel : la rénumération supérieure des coassociés est justifiée par le surcroit de travail

L’assemblée générale ordinaire des associés avait fixé la rémunération de gérance à 6.000 euros par mois, mais les autres médecins cogérants avaient perçu une rémunération supérieure à celle de l’ancien associé, 8.000 euros. La Cour d’appel nota que ce montant supérieur correspondait au surcroît d’activité auquel les autres gérants avaient dû faire face alors que l’ancien associé était en arrêt maladie durant cette période. La Cour d’appel avait noté que « l’indemnité due au cogérant ne peut correspondre qu’à un travail fourni au profit de la Selarl par l’associé cogérant, ce que ne peut manifestement pas faire l’associé absent pour maladie, sauf à lui de justifier que pendant celle-ci il a été en mesure de maintenir sa fonction de gérant auprès de la Selarl » et avait infirmé le jugement du TGI qui lui avait alloué 12.000 euros pour les indemnités de gérant non perçues durant les mois de janvier et février 2006.

Cour de cassation : la rénumération des gérants d’une SARL est due tant qu’aucune décision la révoquant n’est intervenue

Mais la Chambre commerciale de la Cour de cassation cassa l’arrêt de la Cour d’appel de Rennes le 21 juin 2017, au visa de l’article L. 223-18 du code de commerce qui énumère les droits et les obligations des gérants de Sarl, sans toutefois mentionner la rémunération des gérants.

La Haute Cour pose le principe que «la société à responsabilité limitée est gérée par une ou plusieurs personnes physiques, associées ou non, dont la rémunération, fixée soit par les statuts soit par une décision collective des associés, est due tant qu’aucune décision la révoquant n’est intervenue. »  Dès lors, la Cour d’appel ne pouvait pas rejeter la demande en paiement de l’ancien associé au motif que celui-ci n’aurait pu accomplir son travail de gérant puisque l’assemblée générale ordinaire des associés avait bien fixé la rémunération de gérance, y compris celle de l’ancien associé, à 6 000 euros par mois, sans qu’aucune décision ne révoque cette rémunération due à l’associé.

Pas d’atteinte au droit à l’image pour une photo prise dans le cadre professionnel

Un policier municipal, Mr. Jean-Philippe L., avait été photographié à deux reprises en mars 2012 lors des journées d’échange avec l’école nationale de sûreté de la SNCF. Ces photos avaient ensuite été publiées sur un site internet de la SNCF sans que Mr. L. ait autorisé cette publication. Elles furent retirées à la demande de Mr. L., mais la SNCF refusa sa demande d’indemnisation, estimant que le policier n’avait subi aucun préjudice.20102384399_63cf502572_z

Mr. L. assigna la SNCF aux fins de la condamner à 5000 euros en réparation du préjudice qu’il estimait avoir subi pour atteinte à sa vie privée, telle que protégée par l’article 9 du Code civil. Mais selon la SNCF, la demande de Mr. L n’était pas recevable, car les photographies en cause ne permettaient pas son identification, et, en outre, les photographies avaient été prises dans le cadre de son activité professionnelle, ce qui excluait la protection de l’article 9 du code civil et ne rendait pas nécessaire l’autorisation de Mr. L. pour être publiées.

Le TGI de Saint Denis se prononça le 27 août dernier en faveur de la SNCF. Il rappela tout d’abord que  « la protection consacrée par l’article 9 du code civil, est celle de la vie privée, en sorte que ce n’est pas la méconnaissance de la vie professionnelle ou publique, mais exclusivement le non-respect de la vie privée, qui donne droit à réparation du préjudice éventuellement subi. » En l’espèce, les photos avaient été prises dans le cadre de la vie professionnelle de Mr. L.

Le TGI rappela également le principe selon lequel il est nécessaire d’obtenir l’autorisation expresse de la personne prise en photographie avant la diffusion de l’image, à moins que les photos prises « excèdent (…)  l’activité professionnelle consécutive de la finalité de la captation des images litigieuses. » En d’autres termes, le tribunal vérifie si l’image d’une personne, exerçant son activité professionnelle, a bien été prise parce que la personne exerce cette profession. Par exemple, la photographie d’un policier en uniforme photographié buvant de l’eau minérale, prise afin d’illustrer un article sur les bienfaits de l’hydratation, ne pourrait pas être publiée sans autorisation préalable de son sujet car boire de l’eau minérale n’est pas une activité professionnelle, même si le policer est en uniforme.

En l’espèce, les photos prises de Mr. L. « n’étaient pas centrées sur sa personne mais sur un évènement auquel il avait accepté de participer pour des raisons tenant exclusivement a sa vie professionnelle ». Comme Mr. L n’avait pas apporté la preuve d’une atteinte à son droit à son image privée, il fut débouté de sa demande.

Image is courtesy of Flickr user Margaux-Marguerite Duquesnoy under a CC BY 2.0 license.

Publication: biens numériques et biens numériques post mortem

Les Presses Universitaires d’Aix-Marseille viennent de publier L’ordre public numérique. Libertés, Propriétés, identités. J’ai eu le plaisir d’écrire deux des chapitres de ce livre, Les biens virtuels dans les mondes numériques et Le statut post mortem des données accumulées par les personnes sur Internet et sur les réseaux sociaux. La table des matières complète est disponible ici.

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Selon le site des PUAM :

L’hypothèse promue par le présent volume est que l’expertise des risques et des menaces pour les libertés et les propriétés des personnes physiques et morales dans le contexte de la révolution numérique pose, spécialement aux juristes, un problème particulier : cette expertise a quasi-constitutivement une part aléatoire qui, selon les cas, relève ou bien de « l’incertitude » ou bien de « l’incertaineté » sur « où l’on va », autrement dit sur ce que serait, à défaut de terme, du moins une stabilisation de la révolution numérique. Comment penser des libertés et des propriétés numériques lorsque l’objet sociotechnique de ces libertés et de ces propriétés est loin d’être stabilisé ?

Les contributeurs tentent ainsi de mettre en lumière les problèmes posés au droit par cette incertitude et par cette incertaineté à propos de l’identité numérique, de la qualification de l’image comme donnée personnelle ou comme donnée biométrique, de la propriété du courrier électronique, de la commission d’infractions dans les mondes numériques, des biens virtuels dans le monde numérique, de l’avenir des conditions générales d’utilisation applicables aux réseaux sociaux, du statut post mortem des données accumulées par les personnes sur Internet et sur les réseaux sociaux, du cybersquatting, du streaming, du référencement et de Google suggest, de la cyberpolice.

Don du Sang & Homosexualité : Légalité de la Conservation des Données Sans le Consentement du Donneur

La Chambre criminelle de la Cour de cassation a rejeté le 8 juillet 2015 un pourvoi contre un arrêt de la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Paris du 18 avril 2013, qui avait confirmé une ordonnance de non-lieu du juge d’instruction dans une affaire où un homme avait porté plainte pour discrimination sexuelle après que son don du sang ait été refusé par deux hôpitaux parisiens en raison de son homosexualité.PC042307

Laurent X. souhaitait faire don de son sang en 2004, mais ce don fut refusé par l’hôpital Saint-Louis de Paris en raison de l’homosexualité du donneur. Un autre établissement hospitalier de la capitale refusa également le don en 2006, expliquant à Mr. X. qu’il était référencé sous le code « FR 08 »correspondant à la catégorie « homosexuel ».

Mr. X. déposa plainte pour discrimination à raison de l’orientation sexuelle, réprimé par les articles 225-1 à 225-3 du Code pénal. Le juge d’instruction rendit une ordonnance de refus d’informer, car, selon lui, le don de sang n’est pas la fourniture d’un bien ou d’un service au sens de l’article 225-2 2 du Code pénal selon lequel la discrimination consiste à refuser la fourniture d’un bien ou d’un service.

En appel, la chambre de l’instruction infirma l’ordonnance au motif que le juge d’instruction aurait du vérifier si la mise et la conservation en mémoire de données à caractère personnel touchant à l’orientation sexuelle sans le consentement de l’intéressé étaient autorisées par la loi. En effet, l’article 226-19 du Code pénal punit de cinq ans d’emprisonnement et de 300 000 € d’amende « le fait, hors les cas prévus par la loi, de mettre ou de conserver en mémoire informatisée, sans le consentement exprès de l’intéressé, des données à caractère personnel qui, directement ou indirectement, (…)  sont relatives à  (…)[l’]identité» sexuelle [des personnes] ».

Le juge rendit une ordonnance de non-lieu. Mr. X. releva appel, mais l’ordonnance de non-lieu fut confirmée par la chambre de l’instruction qui écarta l’article 226-19 du Code pénal, en se fondant sur l’article L. 1223-3 du code de la santé publique et l’arrêté du 10 septembre 2003 du ministre de la santé publique, relatif aux bonnes pratiques en matière de transfusion sanguine, pour dire l’incrimination prévue par l’article 226-19 du code pénal n’était pas applicable à l’espèce. Selon l’Annexe II de l’arrêté du 12 janvier 2009 fixant les critères de sélection des donneurs de sang, avoir eu, pour un homme, des rapports sexuels avec un homme, est une contre-indication permanente au don du sang.

Mr. X. se pourvu en cassation et posa en outre une question prioritaire de constitutionalité qui fut transmise par la Cour de cassation au Conseil constitutionnel. Selon Mr. X. ,en faisant exception à l’obligation de recueillir le consentement exprès d’une personne désireuse de donner son sang avant de conserver en mémoire informatisée des données à caractère personnel relatives à la santé et l’orientation sexuelle de cette dernière, les dispositions combinées des articles 226-19 du code pénal et de l’article L. 1223-3 du code de la santé publique méconnaissent le principe de légalité des délits et des peines, l’exigence de prévisibilité de la loi, garantis par l’article 8 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 ainsi que l’exigence constitutionnelle de consentement à la captation et à la conservation de données personnelles, garantie par l’article 2 de la Déclaration de 1789.

Le Conseil constitutionnel se prononça par la négative. Selon lui, les dispositions de l’article L. 1223-3 du code de la santé publique n’ont pas pour objet de définir une exception à l’article 226-19 du Code pénal. Ces exceptions sont définies, « en particulier », par l’article 8 de la loi du 6 janvier 1978, dont l’alinéa 1 interdit la collecte des données à caractère personnel relatives à la santé ou à la vie sexuelle des personnes, et dont l’alinéa 2 énumère les exceptions à ce principe, parmi lesquels « les traitements nécessaires aux fins de la médecine préventive, des diagnostics médicaux, de l’administration de soins ou de traitements, ou de la gestion de services de santé». Le Conseil constitutionnel avait déclaré conforme à la Constitution l’article 8 de la loi du 6 janvier 1978 (décision du 29 juillet 2004).

Dans notre espèce, la Cour de cassation rappela tout d’abord que la chambre de l’instruction avait vérifié le protocole suivi par l’hôpital, qui avait bien informé Mr. X. de la nécessité de collecter certaines informations sensibles afin de protéger la santé des transfusés.

La Cour de cassation souligna que, si s’était bien à tort que la chambre de l’instruction s’était fondée sur l’article L. 1223-3 du code de la santé publique pour dire que l’article 226-19 du code pénal ne s’appliquait pas en l’espèce, sa décision n’encourrait néanmoins pas la cassation, car l’article 8 de la loi du 6 janvier 1978 s’applique en l’espèce, et elle rejeta le pourvoi en cassation. Selon la Cour de cassation :

« l’exception à l’exigence d’un consentement de la personne à l’enregistrement et à la conservation de données personnelles relatives à la santé ou à l’orientation sexuelle, qui découle des dispositions combinées des articles 226-19 du code pénal et 8 de la loi du 6 janvier 1978, constitue une mesure légitime, nécessaire à la protection de la santé, définie par la loi avec suffisamment de précision pour éviter l’arbitraire, et de nature à assurer, en l’état, entre le respect de la vie privée et la sauvegarde de la santé publique, une conciliation qui n’est pas déséquilibrée. »

Mr. X. a décidé de saisir la Cour européenne des droits de l’homme.

 

Image is courtesy of Flickr user Bjorn Watland under a CC BY-SA 2.0 license

Le Scoop Qui N’en Était Pas Un, Mais Qui Porta Atteinte à la Vie Privée d’un Célèbre Acteur

Le magazine OOPS avait publié en mai 2015 un reportage sur la prétendue relation amoureuse entre l’acteur Leonardo di Caprio et la chanteuse Rihanna, qui selon l’article, serait enceinte, au grand dam de l’acteur. Cette information était présentée sur la couverture du magazine comme un « SCOOP OOPS ! » avec un photomontage des deux célébrités côte à côte. La couverture avait été reproduite sur les affiches publicitaires du magazine, paru durant le Festival de Cannes, auquel Leonardo di Caprio s’était rendu.

L’acteur assigna OOPS en référé d’heure à heure devant le Tribunal de Grande Instance de Paris (TGI), arguant d’une atteinte à sa vie privée et à son droit à l’image, tous deux protégés par l’article 9 du Code civil. Selon l’acteur, cette publication avait un caractère « intrusif et racoleur » et le présentait en outre sous un jour très peu flatteur, fuyant ses prétendues responsabilités paternelles (« le bébé il n’en veut pas ! »).11052174305_1133b7e483_z

Le droit Français protège le droit à la vie privée des célébrités

L’affaire fût mise en délibéré et le Tribunal de Grande Instance décida le 27 juillet 2015 que l’acteur avait bien subi un préjudice en raison de la publication du magazine. Il condamna OOPS à payer à l’acteur une provision de 8000 euros à valoir sur la réparation du préjudice moral résultant de l’atteinte à sa vie privée et à son droit à l’image, et ordonna en outre à OOPS de publier un communiqué en couverture du premier numéro à paraître après la publication de l’ordonnance de référé informant le public de sa condamnation.

OOPS avait argué que la « star mondialement connue » ne pouvait arguer de la violation de sa vie privée, puisqu’il « «  expos[e] régulièrement ses liaisons », que « sa relation avec Rihanna (…) [est] notoire » et que les photographies de la couverture et celles illustrant l’article sont « parfaitement anodines () [et] ont été prises soit dans un cadre officiel (…) soit dans la rue ou un lieu public ».

Le TGI rappela tout d’abord que l’article 9 du Code civil, ainsi que l’article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (CEDH) protègent la vie privée, que « toute personne, quelle que soit sa notoriété, a droit au respect de sa vie privée et est fondée à en obtenir la protection en fixant elle-même ce qui peut être divulgué par voie de presse » et qu’elle dispose en outre d’un droit sur son image.

Dans une affaire plus récente, le magazine Closer avait publié des photos de deux acteurs dévoilant leur relation amoureuse et fut poursuivi en justice pour atteinte à la vie privée et au droit à l’image. En défense, Closer avait argumenté « que sans invoquer la complaisance de l’intéressé, M.X. évoque régulièrement sa vie sentimentale certes en des termes convenus mais qui ne manquent pas de susciter la curiosité ». Cet argument ne convainquit pas le Tribunal de Grande Instance de Nanterre qui, dans une ordonnance de référé du 4 juin 2015, condamna Closer à payer à l’acteur 10.000 euros à titre provisionnel au motif, notamment, de l’article 9 du Code civil qui « garantit à toute personne, quelles que soient sa notoriété, sa fortune, ses fonctions présentes ou à venir, le respect de sa vie privée et e son image ». Le Tribunal releva que si l’acteur « a pu accepter à l’occasion d’entretiens pour des magazines de révéler quelques éléments d’information sur sa vie privée (…) le tout dans des termes convenus et généraux, il n’est pas avéré (…) qu’il est ainsi entendu entretenir la curiosité du public sur ces éléments de sa vie privée.

Le droit français protège bien la vie privée et le droit à l’image des célébrités, à condition, toutefois, que celles-ci n’aient pas elles-mêmes fait de leur vie privée une information publique, ce qui sera apprécié souverainement par le juge.

Equilibrer le droit à la vie privée et le droit du public à être informé

Dans l’affaire Leonardo di Caprio, le TGI de Paris rappela que le droit à la vie privée et le droit à l’image « doivent se concilier avec le droit à la liberté d’expression et peuvent céder devant la liberté d’informer, par le texte et la représentation iconographique, sur tout sujet susceptible d’entrer dans le champ de l’intérêt légitime du public, sous réserve du respect de la dignité de la personne humaine ».

Selon le TGI, « la diffusion d’informations anodines ou déjà notoirement connues du public n’est pas constitutive d’une atteinte au respect de la vie privée ». Le TGI distingua deux informations, la prétendue liaison entre les deux célébrités et la prétendue grossesse de Rihanna. Si la première information avait bien été discutée par les médias, la seconde, présentée comme un scoop par OOPS, était en fait inexacte. C’est pourquoi il y avait bien une atteinte à la vie privée, car le magazine avait présenté cette grossesse et la paternité de Leonardo di Caprio comme un fait avéré. Pour le TGI, en raison du « caractère particulièrement intime d’une telle révélation [et] de l’absence de tout élément de nature à accréditer, ne serait-ce que de manière infinitésimale, l’exactitude des faits allégués, l’atteinte au respect de la vie privée est, en l’espèce, parfaitement caractérisée, l’information querellée ne relevant en rien d’une légitime information du public ».

Pas de droit à être informé si l’information porte atteinte à la dignité humaine

Le TGI de Paris avait rappelé que le droit français ne protège pas le droit du public à être informe, si cette information porte atteinte à la dignité de la personne humaine.

Un arrêt de la Cour de Cassation du 16 mai 2006 avait cassé un arrêt de la Cour de Versailles qui avait jugé que la publication de photos d’un célèbre acteur français, couché sur un brancard alors qu’il était évacué par hélicoptère suite à un accident de santé, avait porté atteinte à son droit à l’image parce que « ces clichés, pris au téléobjectif sur l’aire de l’aéroport et à l’insu de l’intéressé, [n’étaient pas] nécessaires à l’illustration d’un article lui-même attentatoire à la vie privée ». Mais pour la Cour de cassation , la Cour d’appel avait violé l’article 9 du Code civil et l’article 8 de la CEDH « en s’abstenant de retenir que les deux photographies litigieuses, en relation directe avec l’article qu’elles illustraient, et prises dans un lieu public, ne caractérisaient aucune atteinte à la dignité de la personne de l’intéressé » alors même qu’elle « avait exactement jugé que l’accident survenu au célèbre comédien constituait en l’espèce un événement d’actualité dont la presse pouvait légitimement rendre compte ». Sur renvoi, la Cour d’appel de Versailles jugea le 14 mars 2007 que les photographies portaient bien atteinte à la dignité de l’acteur « qui [avait] toujours cherché à entretenir l’image d’un sportif en pleine forme physique ».

 

Paris Court Denies Copyright Protection to Jimi Hendrix Photograph

Gered Mankowitz is a British photographer who photographed many famous musicians such as Mick Jagger and Annie Lennox. He took several photographs of Jimi Hendrix in 1967. One of these photographs represents the musician, wearing a military jacket, holding a cigarette and puffing a cloud of smoke while looking at the photographer. An original print recently sold at auction for £2,750.

This photograph was used without authorization in 2013 for an advertising campaign by Egotrade, a French electronic cigarette company. The ad showed Jimi Hendrix holding an electronic cigarette and the “Egotabaco” brand was printed on the ad.

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Gered Mankowitz and Bowstir Ltd, the company to which Mr. Mankowitz has assigned his patrimonial rights to the photography, filed suit in France. Bowstir claimed copyright infringement and Mr. Mankowitz claimed droit moral infringement. On May 21, the Paris Tribunal de Grande Instance (TGI), a court of first instance, ruled that the Jimi Hendrix photograph could not be protected by French intellectual property law, as it was not original.

French intellectual property law does not provide a definition of “originality.” Article L. 111-1 of the French Intellectual Property Code provides that “[t]he author of a work of the mind shall enjoy in that work, by the mere fact of its creation, an exclusive intangible property right enforceable against all. This right shall include attributes of intellectual and moral attributes as well as patrimonial attributes.” Article L. 112-1 specifies that the law “protects the rights of authors in all works of the mind, whatever their kind, form of expression, merit or purpose.”

The TGI cited the European Court of Justice (ECJ) Eva Maria Painer. v. Standard Verlags case, where the Court had discussed the originality of a picture taken by a school photographer. For the ECJ, which the TGI cited verbatim,

“[a]s stated in recital 17 in the preamble to Directive 93/98, an intellectual creation is an author’s own if it reflects the author’s personality. That is the case if the author was able to express his creative abilities in the production of the work by making free and creative choices. … As regards a portrait photograph, the photographer can make free and creative choices in several ways and at various points in its production. In the preparation phase, the photographer can choose the background, the subject’s pose and the lightening. When taking a portrait phoograph, he can choose the framing, the angle of view and the atmosphere created. Finally, when selecting the snapshot, the photographer may choose from a variety of developing techniques the ones he wishes to adopt or, where appropriate, use computer software. By making those various choices, the author of a portrait photograph can stamp the work created with his ‘personal touch’” (ECJ 88-92).

Indeed, Recital 17 of Directive 93/98/EEC states that a photograph is original “if it is the author’s own intellectual creation reflecting his personality, no other criteria such as merit or purpose being taken into account.” Article 6 of the same Directive states that photographs are original if “they are the author’s own intellectual creation.” This directive was repealed by Directive 2006/116/EC, of which Recital 16 reprises the same words than Recital 17.

The TGI then examined the Jimi Hendrix photograph. Gered Mankowitz had explained to the court that

this photograph of Jimi Hendrix, as extraordinary as it is rare, succeeds in capturing a fleeting moment of time, the striking contrast between the lightness of the artist’s smile and the curl of smoke and the darkness and geometric rigor of the rest of the image, created particularly by the lines and angles of the torso and arms. The capture of this unique moment and its enhancement by light, contrasts and the narrow framing of the photograph on the torso and head of Jimi Hendrix reveal the ambivalence and contradictions of this music legend and make the photograph a fascinating work of great beauty which bears the stamp and talent of its author.”

This argument did not convince the TGI as Mr. Mankowitz,

as doing so, satisfied himself by highlighting the aesthetic characteristics of the photography which are distinct from its originality which is indifferent to the merit of the work, and does not explain who the author of the choices made regarding the pose of the subject, his costume and his general attitude. Also, nothing [in this argument] allows the judge and the defendants to understand if these elements, which are essential criteria in assessing the original features claimed, that is, the framing, the use of black and white, the light decor meant to highlight the subject, and the lighting being themselves typical fora portrait photography showing the subject facing, with his waist forward, are the fruit of the reflection of the author of the photograph or the subject, and if the work bears the imprint of the personality of Mr. Mankowitz or of Jimi Hendrix.”

Since the judges are therefore not able to appreciate whether this photograph is indeed original, the TGI ruled hat the photography lacked the originality necessary for its protection by French law, and that “the failure of the description of the characteristic elements of the alleged originality also constitutes a violation of the principle of defense rights.” The TGI thus concluded that Mr. Mankowitz had no intellectual property rights over the photograph.

By doing so, the TGI did not deny that this particular photography of Jimi Hendrix is not original. Rather, the court was not convinced that originality of the work was the result of choices made by Mr. Mankowitz. This case is less about what is an original work than how to prove that a work is indeed original.

As such, this ruling should give pause to French IP practitioners defending the rights of a photographer, as they must now prove why the author chose the different elements of a photograph and how these choices reflect his personality in such a way that the work is original. However, the case will be appealed, and so the debate on what is an original work, and how to prove, it is still ongoing in France.

 

Image is courtesy of Flickr user SarahElizabethC under a CC BY-ND 2.0 license.

This post was originally  published on The 1709 Blog.